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Publié le samedi, 20 avril 2024 à 09h57

Mirko Sabatino, La vie antérieure. C’est l’histoire d’un mec

Par Stefano Palombari

La vie antérieure de Mirko Sabatino - couverture

Ettore a quatre mères, mais pas de père. Son géniteur s’est fait la malle le jour de sa naissance. Sa mère biologique est épaulée dans son rôle par ses deux tantes et sa grand-mère. Une créature tétracéphale féminine tente donc de préserver le petit Ettore des aspérités de la vie. Son grand-père Ottavio est le représentant unique de la gent masculine. Le rapport de l’ancêtre avec le jeune garçon est particulier, Ettore étant le fils qu’Ottavio n’a jamais eu.

On est dans une ville indéterminée des Pouilles. Ottavio possède un café pâtisserie qui porte son nom. C’est sa fierté, le projet d’une vie, et même plus : une promesse. Qu’il ne peut malheureusement pas tenir. Un emprunt hasardeux, un excès de confiance et un cœur faible le privent soudainement de son commerce. Un accident de la route prive le jeune Ettore de la seule figure masculine de la famille. Le même accident lui offre en échange, un ami, son grand ami, Bruno. Aux deux protagonistes liés à jamais par un drame, s’en ajoute un troisième, Irene.

L’histoire démarre à la fin des années 1970. On voit Ettore grandir, s’épanouir. Ses projets se précisent, les satisfactions sont au rendez-vous. Ettore devient un célèbre écrivain. Cependant, plane toujours une ombre, celle d’une absence inexpliquée. La quête se poursuit, désespérée et solitaire. La vie de ses amis est également tachée d’absences, de plis. Bruno, pianiste talentueux au succès fulgurant, ne s’est jamais remis de la mort de ses parents. Irene qui garde le Café Pâtisserie, appartenu autrefois à Ottavio, est hantée par l’indifférence et l’égocentrisme de sa mère...

Bien écrit et bien conçu, La vie antérieure se lit avec plaisir. Au-delà de l’histoire universelle de la quête du père et des autres traumatismes provoqués par la famille, l’ouvrage est intéressant du point de vue sociologique. Une fois la dernière page tournée, on se rend compte que, des trois amis, Irene, est la seule à ne pas avoir eu une véritable reconnaissance professionnelle. Et d’ailleurs, rétrospectivement, on réalise que dans tout le roman, les femmes ne sont qu’un support muet. Elle font partie du chœur. Un simple élément structurel qui œuvre dans le silence pour que l’homme puisse réussir. Paraphrasant Stendhal, la littérature n’est qu’un miroir objectif d’une réalité qui souvent peine à s’affranchir de ses vieux démons.

Informations pratiques
  • Mirko Sabatino, La vie antérieure, traduit de l'italien par Lise Caillat, Denoël, 22€