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Publié le samedi, 22 juin 2019 à 09h49

Le Zoo de Rome, roman de Pascal Janovjak

Par Riccardo Borghesi

Le zoo de Rome - couverture

"Les gens qui fréquentent souvent les zoos, ils ont toujours un problème. Ou alors ils ont des enfants". C’est peut-être pour cette raison que l’auteur a choisi de situer son roman, résultat d’une résidence à l’institut suisse de Rome, dans cet endroit (le zoo de Rome) finalement marginal dans les affaires de la ville. Il l'a choisi comme l'écran à travers lequel observer les ombres de l'histoire et de la société italienne, des passions et des pulsions humaines, mais aussi et surtout de la relation déformée et malade entre l'homme et l'animal.

"Le zoo est un sanctuaire de l'innocence", nous dit l'auteur. Mais ici la seule innocence est celle de l'animal captif qui reste pur même lorsqu'il arrache le bras de celui qui tente de le caresser à travers les barreaux. Une innocence à contempler, à rêver, fétiche de notre cruauté.
Face à cette innocence, des personnages souvent à la limite de la marginalité et qui ont l'air d'avoir perdu la cognition du présent, semblent venir faire naufrage, s'échouer comme des vieux troncs portés par les vagues, comme des phalènes à la lueur nocturne.

Un architecte algérien à la recherche du fantôme de sa fille, un ancien gardien qui vit le zoo comme un refuge, un vétérinaire brillant et mégalomane qui poursuit la gloire par tous les moyens, la directrice de la communication du zoo, dépaysée et déplacée, qui cherche réconfort dans une histoire d'amour insensée et sans avenir. Le livre se développe le long de deux axes parallèles qui s'entrelacent jusqu'à se rejoindre : le premier suit l'histoire du zoo de la genèse - il est contemporain des grands zoos européens bien plus célèbres que lui -, en passant par le fascisme, la guerre, la reconstruction, l'abandon, les privatisations jusqu'à nos jours, le second tient le présent, où se déroulent les événements des personnages ici échoués.

Une écriture élégante et raffinée, un ton toujours posé et un sens de l'humour subtil, contribuent a nous placer hors du temps, dans un présent onirique aux marges de la modernité, où l'actualité est faite d'échos lointains, d'une consistance presque de mirage.

Mais l'incursion soudaine et violente du monde extérieur dans la vie retirée de ce microcosme ne peut avoir que des conséquences désastreuses et, avec un crescendo apocalyptique et grotesque, elle mènera à la tragédie finale et à la catharsis qui s'en suit: des cendres de la vanité humaine rachetée par la naissance inattendue d'un enfant, l'innocence -tendrement symbolisée par le défilé d'animaux en peluche qui décorent sa chambre- renaîtra et regagnera sa place inexorablement.

Informations pratiques

Pascal Janovjak, Le Zoo de Rome, Actes Sud, 19,80 €
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