Publié le dimanche, 15 mars 2020 à 10h29
Le Cheik blanc de Fellini ressort en version restaurée
Dans le cadre du travail de restauration entrepris par la Cineteca de Bologne pour le centenaire de la naissance de Federico Fellini, Tamasa poursuit la distribution du cycle qui avait débuté en février dernier : « Fellini, la preuve par trois ». Après la sortie des Nuits de Cabiria et des Vitelloni, voici Le Cheik blanc, restauré en version 4K, sur les écrans dès le 18 mars 2020.
Réalisé en 1951, Lo Sceicco bianco est le second film de Fellini et met à nouveau en scène, après Les feux du music-hall, l’univers du spectacle vivant, son envers et ses paillettes, le quotidien d’une troupe d’artistes. Nous suivons ici un trio attachant ainsi qu’une galerie des personnages secondaires : Wanda, le fameux cheik blanc et Ivan. Wanda (Brunella Bovo), jeune femme romantique et rêveuse, vient de se marier avec Ivan (Leopoldo Trieste), un homme sérieux et très soucieux de la bienséance. Fraîchement arrivés à Rome pour leur voyage de noces, Wanda profite d’une occasion pour s’échapper de l’hôtel et rencontrer secrètement « le cheik blanc », héros d’un roman-photo dont elle est éprise et avec qui elle correspond en cachette. Alberto Sordi prête ses traits à cet aventurier exotique sur le papier, et qui, en réalité, n’est pas si exotique, ni aventurier que ça...
La bonhommie et l’indolence de Sordi permettent à Fellini de jouer sur la crédulité de la jeune femme et le décalage comique entre la vision romanesque d’une vie fictionnelle et la réalité triviale d’un acteur dont l’existence est relativement commune, voire quelconque. A contrario, la nervosité du jeu de Trieste amplifie l’idée de carcan de la vie domestique et, disons le, domestiquée. Comme toujours chez Fellini, les personnages sont dotés d’une profondeur psychologique sans égal, qui perce sous l’apparence d’une certaine nonchalance ou mélancolie.
De même, les trouvailles du scénario : l’apparition du cheik costumé et suspendu sur une immense balançoire, ses élans démesurés et pathétiques, ou bien la confrontation jubilatoire du mari avec le commissaire de police et son sens, quant à lui, du désespoir outragé, permettent de mesurer combien la bouffonnerie des deux personnages masculins peut être proche d’une sublime sensibilité. A se demander si, déjà chez Fellini, le rêve et la démesure ne sont pas une manière de vivre le réel car ils ouvrent l’accès à cette dialectique de la vérité et de l’illusion.
Fellini le dit en ces termes : « Quand dans mes films la charge lyrique de l’inspiration, qui est toujours un acte d’amour, me permet de faire se dessiner un sourire sur un visage en pleurs, de tendre la main à celui qui est sur le point de glisser en perdition, de montrer son chemin à celui qui s’est égaré, d’offrir un idéal à celui qui n’a rêvé que de fantasmes, quand j’arrive à dépouiller de leurs mensonges les aventures de la vie, alors j’ai l’impression de n’avoir trahi personne, de m’être fait du bien à moi, avant même d’en avoir fait aux autres ».
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