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Publié le jeudi, 25 juin 2020 à 09h40

La mère d’Eva, roman de Silvia Ferreri

Par Stefano Palombari

La mère d’Eva - couverture

Eva est une jeune fille qui, dès son plus jeune âge, ne se sent pas à l’aise dans son corps. Elle souffre de dysphorie sexuelle. Nous suivons Eva de sa naissance à ses 18 ans, lorsque, sous les fers d’un chirurgien serbe, la chrysalide laissera la place à un papillon. Mais la narration démarre bien avant sa naissance car, en réalité, le sujet du livre n’est pas Eva mais sa mère.

Tout ce qui concerne Eva, sa position dans le monde, son rapport aux autres, ses déceptions, ses frustrations... nous l’apprenons, nous le vivons par l’intermédiaire de sa mère. Et ce n’est pas un intermédiaire neutre. Au début, le lecteur peut tomber dans le piège de l’objectivité présumée de la narratrice. Une posture qui, au fil du récit, commence à se fissurer pour finalement trahir son imposture.

Le drame d’Eva n’est, pour sa mère, qu’un drame subit par ricochet. Ce n’est pas la souffrance d’un enfant né dans un corps qu’il ne reconnaît pas mais la honte que cette situation lui provoque. La mère d’Eva est une femme en quête de normalité. Une Milanaise transplantée à Rome, ville qu’elle déteste, car comme au sujet de sa fille, elle ne la comprend pas. Et elle ne fait aucun effort. Fascinée par la régularité nordique, elle est dépourvue des outils pour saisir que le chaos est vie et que la vie n’est que mutation, changement, métamorphose.

La transformation finale d’Eva est aussi symboliquement l’acceptation, comme une sorte de résignation, d’une complexité qui échappe aux règles d’une présumée normalité. Entravée depuis toujours par ses certitudes, la mère d’Eva ne change pas. Elle semble cependant laisser un petit espace pour que le doute puisse s’engouffrer.

Informations pratiques

Silvia Ferreri, La mère d’Eva, traduit de l'italien par Chantal Moiroud, Hervé Chopin, 19 €
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