Archives Cinéma

Publié le lundi, 21 juin 2010 à 17h20

Dans les entrailles de la ville de Gênes

Par Stefano Palombari

Enzo parle à son amour qui ne lui répond pas. Mary écrit à son chéri en prison, mais on n'a pas de réponses. Deux solitudes se rencontrent. Deux monologues juxtaposés qui tentent de se métamorphoser en dia-logues. Ardu, lorsqu'on a tant souffert. Enzo porte sur ses épaules le poids de son passé. La pauvreté d'un père vendeur à la sauvette, l'humiliation d'une origine autre. Sicilien parmi les Gênois, son parcours a tout pour le faire échouer.

Mary est aussi marquée par la différence qui tant effraie les bien pensants. Ce n'est pas le passé mais le présent qui en porte les stigmates. Né(e) homme à l'extérieur et femme à l'intérieur, depuis qu'elle a décidé de masquer son apparence, pour la rendre compatible avec ses sensations et ses sentiments, elle n'a pas cessé d'être victime d'actes d'intolérance.

Mary et Enzo se rencontrent en prison. Exclus parmi les exclus, ils se donnent mutuellement la force de percer la carapace de leur isolation. Un belle histoire d'amour éclot parmi les laideurs des couloirs d'une maison d'arrêt. Pour après poursuivre son chemin jusqu'à la réalisation d'un rêve, presque interdit, tellement il semblait impossible.

La bocca del lupo, la gueule du loup, est loin d'être un film banal. Le langage cinématographique est innovateur et courageux. L'excellente utilisation d'images d'archives permet aussi d'encrer le film dans son lieu. Dans la ville de Gênes, ses ruelles et la vie nocturne. Par ailleurs la complexité du sujet ne permettait pas un tournage linéaire, ce qui aurait fort probablement provoqué un effet de banalisation.

Une petit anecdote, en dépit de son thème, qui peut paraître dérangeant, ce film est né d'une commande de la Fondation Jésuite San Marcellino de Gênes, qui a été d'ailleurs très satisfaite du résultat. La Bocca del lupo est le premier film que l'on peut voir en France grâce à la distribution de Bellissima Films, qui vient d'être crée pour la distribution de films italiens en France. Voilà une excellente nouvelle.

Vincenzo Motta, Enzo, dans une scène de La bocca del lupo
critique du film La bocca del lupo