Publié le mercredi, 29 mai 2024 à 10h05
Daniele Mencarelli, La maison des regards. La vie derrière soi
Tutto chiede salvezza (Nous voulons tous être sauvés), livre poignant de Daniele Mencarelli sur son expérience en hôpital Psychiatrique a permis de faire connaître cet auteur de façon, disons, intime. Le roman a eu un succès mérité à sa parution en France et en Italie, il a gagné le « prix Strega jeunes ». La Maison des regards qui vient de paraître est en réalité son premier roman. L’auteur y raconte ses addictions, notamment à l’alcool, et sa lutte pour s’en débarrasser.
Vivre avec quelqu’un qui est possédé par une addiction est une épreuve physique et morale. La famille de Daniele en sait quelque chose. Daniele, vingt-cinq ans, boit sans retenue. Bière, vin, alcool fort… tout est bon pour se saouler. L’ivresse, déjà pénible en soi, est aussi la cause d’autres désagréments, de bagarres et d’accidents de voiture à répétition. Ses parents n’ont plus de vie en dehors de leur fils et sa « maladie ». Ils sont au bout du rouleau.
L’origine de son malaise est sa sensibilité acérée, qui le pousse à ingurgiter tout liquide alcoolisé afin d’oublier le mal qui entache le monde, ou du moins de tenter de le faire. Les difficultés et les souffrances d’autrui deviennent les siennes. Sa sensibilité et son empathie n’ont pas que des effets négatifs. Elles lui permettent également d’écrire des poèmes.
Par le biais de l’un de ses contacts dans un magazine littéraire, Daniele a l’opportunité de décrocher un travail au sein d’une entreprise de nettoyage qui opère dans l’hôpital Bambin Gesù à Rome, un hôpital pour enfants. Travailler dans un environnement où se trouvent des enfants malades lorsqu’on est hypersensible, ce n’est à priori pas très raisonnable. C’est tout l’enjeu : effet homéopathique ou accentuation du malaise ?
La maison des regards, comme d’ailleurs Nous voulons tous être sauvés, est un roman autobiographique. Les évidentes qualités littéraires des deux livres brouillent les pistes. La capacité de Daniele Mencarelli d’insuffler la vie dans les personnages, et tout particulièrement dans son alter-ego littéraire, donne au lecteur l’impression de lire une œuvre de fiction. L’auteur ne fait preuve d’aucune complaisance avec soi-même. Il n’hésite pas à mettre en exergue ses nombreuses zones d’ombre. Le roman est peuplé de personnages d’une humanité bouleversante. Les collègues d’abord, qui se transforment vite en amis, et puis les petits patients et leurs familles. On baigne dans une douleur aux effets thaumaturgiques.
Informations pratiques
- Daniele Mencarelli, La maison des regards, traduit de l'italien par Nathalie Bauer, Éditions Globe, 23€