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Publié le dimanche, 26 décembre 2021 à 10h56

Benedetta Craveri, La Contessa. L’Histoire dans le boudoir

Par Stefano Palombari

Benedetta Craveri, La Contessa - couverture

Finalement, les grands événements ne tiennent pas à grand-chose. Quelques galipettes peuvent changer le destin d’un pays. Et si le Risorgimento, la période de l’histoire d’Italie qui a permis à cette « entité géographique » de devenir une nation, eût été vain sans le charme de la comtesse Virginia Oldoini Verasis di Castiglione ?

C’est une théorie intéressante qui n’est pas dénuée d’éléments. Que La Contessa ait joué un rôle dans la décision de Napoléon III d’intervenir aux côtés du Piémont pour libérer la Lombardie du joug autrichien, était une hypothèse déjà avancée mais plutôt sous forme de légende. Le remarquable ouvrage de Benedetta Craveri apporte des preuves à cette piste. La quantité de matériel exploré par l’auteure pour retracer le parcours de cette femme belle et manipulatrice est impressionnante.

Née en Toscane, dotée d’un beauté extraordinaire, Virginia Oldoini apprend vite à se servir de ses charmes comme d’une arme. Dès son plus jeune âge, elle séduit avec l’habileté d’une routière. Telle une araignée, elle fait tomber les hommes de tout âge dans sa toile et s’amuse à les voir souffrir. Il n’est donc pas surprenant que Napoléon III tombe également dans son escarcelle. D’après Benedetta Cravieri, elle serait carrément la première maîtresse de l’empereur.

C’est à ce moment-là où le rôle de Virginia quitte la sphère proprement privée pour devenir politique. Lors de ses ébats avec le fossoyeur de la Deuxième République, elle aurait eu des arguments solides pour faire pencher la balance du côté de l’intervention française. Son goût de la politique ne s’arrêtera pas une fois l’unité du pays atteinte. Elle continuera à être influente, plus de ce que l’on pense, notamment pendant la guerre Franco-Prussienne, jusqu’à la chute de la commune de Paris, grâce à son amitié avec Bismarck et Thiers.

Cependant, son rôle essentiel pour l’unité de l’Italie s’accordait mal avec le récit officiel et le mythe fondateur de la nation. A sa mort, l’État italien fera tout son possible pour détruire les papiers compromettants que Virginia conservait jalousement. Dans l’Histoire les actions les plus utiles sont parfois les plus encombrantes.

Informations pratiques
  • Benedetta Craveri, La Contessa, traduit de l'italien par Dominique Vittoz, Flammarion, 26 €

Vous pouvez commander ce livre, en italien ou en français, sur le site de La LIbreria