Une petite guerre parfaite de Elvira Dones

Par Luca Almonti

Le titre du roman d' Elvira Dones pourrait nous induire en erreur. Il y a trois femmes enfermées dans un appartement à Pristina. Elles sont barricadées  presque sans eau ni nourriture et dehors il y a la guerre du Kosovo.

Dès les premières pages on se croirait dans une pièce de Beckett. Peut-être que l'on assistera a des disputes, certes il y aura aussi quelques traces de folie, mais le titre nous rassure. La guerre est petite, la guerre est parfaite, donc la violence devrait bien s'arrêter devant le seuil des trois femmes. Elle les effleurera, c'est tout.

Et pourtant, la photo de couverture aurait dû nous faire douter. A bien y regarder, la main qui se pose contre le mur est ambiguë . Elle barre le chemin à quelqu'un ou elle s'écrase pour ne pas tomber ?

Cette simple question est la synthèse parfaite de tout le roman. La guerre était déjà cachée à l'intérieur de l'appartement et toute tentative de fuite sera inutile.

Encore un livre sur la guerre, je me suis dit. Sans doute chaque guerre mérite d'être racontée, mais j'ai l'impression que désormais le point de vue choisi par l'écrivain soit devenu plus important que le témoignage. Et bien, ce n'est pas le cas de ce roman. Elvira Dones nous fait vivre la vrai guerre à travers la fragilité de ses personnages traqués et épuisés.

Leur incrédulité face à la violence des serbes est tellement naturelle qu'elle aurait pu être la nôtre. Ils écrivent des mails comme nous, il ne savent pas comment s'en sortir, ils essayent de s'échapper, peut-être même pas vraiment. L'Albanie n'est pas si lointaine et pourtant d'un jour à l'autre, la loi du plus fort a tout changé. Les voix féminines qui hantent le récit, gravent dans la pierre leur terrible témoignage. Et elles nous font douter, peut-être pour la première fois, de l'inébranlable certitude de l'occident.