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Publié le dimanche, 6 décembre 2015 à 16h52

Jhumpa Lahiri, En d'autres mots

Par Francesco Trippitelli

Jhumpa Lahiri

Le livre de Jhumpa Lahiri, Prix Pulitzer il y a cinq ans pour 'L'interprète des maladies' (Mercure de France), raconte l'histoire d'une passion, celle de l'auteur pour la langue italienne et, en général, pour l'écriture.

L'auteure, romancière américaine originaire du Bengale, a écrit ce livre en italien après avoir vécu longtemps à Rome et à Venise. Vous pouvez le lire aux éditions 'Actes sud' avec la traduction de Jerome Orsoni.

Comme toutes les passions les plus séduisantes et compliquées, il s'agit d'un triangle amoureux. À la base il y a l'anglais, la langue dans laquelle l'auteur se sent à l'aise, le fondement, tandis que le bengali et l'italien sont les côtés plus faibles, indistincts. L'un est la langue de ses parents, le souvenir toujours présent du Bengale, l'autre un besoin fou, qui comme dans tant des relations passionnelles deviendra une dévotion, une obsession.

Jhumpa Lahiri est tombée amoureuse de l'italien, c'est un coup de foudre. La relation avec cette langue étrangère, difficile et le parcours de l'apprentissage sont résumés par l'auteur dans la métaphore du lac: on ne peut pas nager sans prendre le risque de se noyer, de couler à pic. Pour connaître une nouvelle langue, pour s'immerger, il faut quitter la rive, sans bouée de sauvetage.

Elle commence avec la récolte des mots: « chaque jour, j'entre dans un bois un panier à la main ». Elle récolte les mots qui lui semblent plus obscurs, par exemple spigliatezza, ou des beaux mots qui n'ont pas d'équivalents en anglais (chiarore, formicolare).

Puis, elle passe à étudier l'emploi des prépositions et de l'article: « Pourquoi dit-on c'è vento ( il y a du vent), mais c'è il sole (il y a le soleil) ? ». Ou même la différence entre era et è stato, imparfait et passé composé. Qu'elle résout très bien en disant que : « à la fin d'un dîner, on dit E' stata una bella serata, et Era una bella serata... quand la phrase n'est pas terminée ».

Toutes les réflexions de l'auteure sont destinées à décrire l'histoire d'un parcours initiatique très dur, d'un désir pur de connaissance, avec les oscillations, les moments de panique et de méfiance, et enfin la satisfaction de pouvoir écrire un livre en italien: mais, sous la surface, il y a la question fondamentale: « Pourquoi est-ce que j'écris ? ». Et la réponse à telle question est en même temps la raison qui l'a pressée à apprendre la langue italienne. Elle dit: « Pour connaître le mystère de l'existence. Pour me tolérer moi-même. Pour approcher tout ce qui se trouve hors de moi. L'écriture est ma seule façon d'absorber et d'ordonner la vie. ».

Informations pratiques

Jhumpa Lahiri, En d'autres mots, Actes-Sud, 16,80 €
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