Publié le mardi, 16 novembre 2021 à 09h42
Antonio Moresco, Les ouvertures. Les bals du débutant
Parler en quelques lignes de ce livre de Moresco est une opération particulièrement ardue car il s’agit d’un ouvrage très complexe. C’est une publication totalement à part dans le contexte des livres italiens traduits en français ces dernières années. Dès les premières pages, nous sommes décontenancés. Le lecteur a l’impression d’être tombé dans le terrier du lapin, catapulté dans une sorte de pays des merveilles.
Le titre « Les ouvertures » ne rend que partiellement gli esordi qui signifie également les débuts. Le livre est divisé en trois parties, et dans chaque partie le protagoniste débute et ne dépasse jamais cette phase. Dans la première il est un jeune séminariste au couvent, dans la deuxième un apprenti révolutionnaire et dans la troisième il tente d’entamer une carrière d’écrivain.
Au bout de quelques pages, le lecteur s’aperçoit que le protagoniste, narrateur à la première personne, ne parle pas. Il se limite à observer le monde qui l’entoure. C’est un passeur d’expériences, un miroir déformant. Le monde subit ainsi une anamorphose. Le prisme du narrateur, prive les gens de leurs noms. Ils ne sont désignés que par des surnoms liés à leurs caractéristiques physiques, leurs fonctions, leurs attitudes… au fur et à mesure que l’on avance dans la lecture l’absurde et le paradoxe gagnent du terrain même si à partir de la deuxième partie, le narrateur trouve enfin la parole.
Un dynamisme particulier empreigne toute la narration. Un mouvement dialectique qui se manifeste dans des rituels où la répétition est entachée de différences parfois infimes. L’impossibilité du résultat est le sort commun au trois parties. Les tentatives réitérées n’aboutissent jamais comme si la vérité résidait dans l’action. Dans la troisième partie, celle de la synthèse, de la parole écrite (parole muette), on retrouve certains personnages de la première.
Les ouvertures est « le livre » d’Antonio Moresco qui a commencé à y travailler lorsqu’il avait 36 ans et il l’a eu entre les mains édité à 51, en 1998. Le livre est ressorti il y a dix ans, dans une version remaniée par l’auteur. Comme tous les grands livres, il est indéfinissable. On se surprend à en savourer certaines phrases, certains passages. Chaque paragraphe est une plongée dans une substance littérairement inconnue, dense de matière à réflexion. Bref une lecture qui nous accompagnera pour un bon bout de temps.
Informations pratiques
- Antonio Moresco, Les ouvertures, traduit de l'italien par Laurent Lombard, Verdier, 31 €
Vous pouvez commander ce livre, en italien ou en français, sur le site de La LIbreria