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Publié le mercredi, 6 février 2019 à 10h18

Santiago, Italia, nouveau film de Nanni Moretti

Par Roberta Spirito

Santiago, Italia - affiche

Sacher Film et Le Pacte présentent Santiago, Italia, nouveau film de Nanni Moretti. Chaque film du réalisateur romain est un petit événement. Ici il s'attaque à un 11 septembre, le 11 septembre d'il y a 45 ans. Le coup d'État de Pinochet au Chili. Un 11 septembre expliqué par le plus récent.

Après le coup d'État militaire du général Pinochet de septembre 1973, l'ambassade d'Italie à Santiago (Chili) a accueilli des centaines de demandeurs d'asile. À travers des témoignages, le documentaire de Nanni Moretti raconte cette période durant laquelle de nombreuses vies ont pu être sauvées grâce à quelques diplomates italiens.

Le réalisateur explique la genèse du film : "''Tout a commencé au printemps de l’an dernier : j’étais à Santiago pour une conférence et l’ambassadeur italien m’a parlé de deux jeunes diplomates qui avaient décidé d’accueillir les dissidents politiques. J’ai découvert une belle histoire italienne d’accueil et de courage, un exemple de la façon dont les individus peuvent faire la différence. C’était une histoire de ma jeunesse, alors j’ai repensé à l’importance qu’avait eu à cette époque l’expérience chilienne, la figure du président Allende et ensuite le bouleversement du coup d’État. C’est ainsi que je me suis mis à travailler : quarante heures d’entretiens, non seulement pour parler du Chili mais aussi de l’Italie d’alors, du pays qui a le plus aidé''."

Mais pourquoi parler du coup d’État au Chili aujourd’hui ? "Pendant que je tournais, on me le demandait souvent et je ne savais pas bien quoi répondre. Puis, une fois le tournage terminé, Matteo Salvini est devenu ministre de l’Intérieur et alors j’ai compris pourquoi j’avais tourné ce film. Je l’ai compris a posteriori."

Au Chili, le 11 septembre 1973, un coup d’État renverse le gouvernement de Salvador Allende. Le pouvoir passe entre les mains du général Augusto Pinochet, les rafles de dissidents politiques commencent, les tortures, les disparitions. À Rome, le président du Conseil est le Démocrate-Chrétien Mariano Rumor ; dans son gouvernement il y a des figures comme Antonio Giolitti et Ugo La Malfa, et aux Affaires étrangères il y a Aldo Moro.

À Santiago, ce jour-là, l’ambassadeur est absent - dans la représentation italienne il n’y a que deux jeunes diplomates, Piero De Masi et Roberto Toscano. Quand les premiers jeunes qui fuient les militaires frappent à la porte, ils décident d’ouvrir et de les accueillir. L’ambassade italienne deviendra en quelques semaines le seul refuge, une île de salut. Quiconque fuit doit, pour entrer, sauter le mur d’enceinte, le salut dépend de cette épreuve. La grande villa et le parc se transforment pendant un an en une commune où l’on mange et on dort n’importe où, où l’on prépare les laissez-passer pour les demandeurs d’asile, où s’organisent les transferts pour l’aéroport.

Six cents personnes réussiront à monter dans un vol pour l’Italie avec la complicité jamais déclarée de ce ministre des Affaires étrangères qui, en une sorte de silence-consentement typiquement démocrate-chrétien, ne répondra jamais aux demandes d’autorisation d’accueil qui arrivaient de l’ambassade à Santiago. Un des deux jeunes fonctionnaires de notre ambassade à Santiago se souvient des jours où l’Italie sauva de nombreux asilados.

Informations pratiques

Au cinéma à partir du 27 février 2019

Jeu-concours des places à gagner (terminé) réservé aux abonnés à notre lettre