Publié le mercredi, 26 février 2020 à 09h39
Nuits blanches de Luchino Visconti, ressort en salles en version restaurée
Nuits blanches, de Luchino Visconti, sort en salles en version restaurée le mercredi 26 février 2020. Initialement réalisé en 1957 à Cinecittà, Le notti bianche est une adaptation-transposition de la nouvelle de Dostoïevski dans une Livourne hivernale, hypnotique et miroitante. Comme toujours chez Visconti, le soin accordé à la beauté des plans et des détails scénographiques n’a d’égal que la virtuosité scénaristique et la justesse des échanges dialogués.
Placé sous le signe des déambulations nocturnes et de la rêverie, à l’instar des Nuits blanches de l’écrivain russe, dont la nouvelle parue en 1848, est sous-titrée « extraits des souvenirs d’un rêveur », ce film est réalisé entièrement en studio et filmé dans un noir et blanc majestueux. Les personnages se déplacent entre les canaux, sur les ponts, traversent les places et les arcades dans cette « petite Venise » nimbée d’un voile onirique (en réalité, du tulle disposé entre la caméra et les décors pour donner cette illusion vaporeuse), aux contrastes d’ombre et de lumière, aux reflets et miroitements de l’eau, aux échos lointains. La filmographie du metteur en scène milanais a effectivement toujours été le lieu d’un questionnement sur les apparences et, ici, plus que jamais, on oscille entre minutie de la recréation et authenticité du sentiment amoureux.
Transposée dans l’Italie des années 50, Visconti reste relativement fidèle à la trame originelle : Mario (Marcello Mastroianni), un homme solitaire récemment muté dans la ville, rentre chez lui un soir lorsqu’il fait la rencontre d’une jeune inconnue, Natalia (Maria Schell), en pleurs et désemparée. La conversation s’engage et Mario tombe sous le charme de cette jeune femme mystérieuse, naïve et touchante. Passée cette rencontre, ils se retrouvent deux autres soirs au cours desquels chacun dévoilera ses pensées intimes, ses secrets et ses sentiments. A l’issue d’une nuit blanche, le soleil se lèvera sur une ville recouverte d’un blanc immaculé et une vie nouvelle pour les deux personnages.
Les notions de temps et de mouvement sont centrales dans ce film : à travers la logique du rendez-vous nocturne et de la déambulation tout d’abord, mais aussi par des souvenirs racontés ou visualisés par des flashbacks et l’importance des signes corporels très subtils. Dans cette ville-scène théâtrale à ciel ouvert, les déplacements et les positionnements scéniques, les jeux de regards sont orchestrés très minutieusement et nous interpellent sur la dialectique rêve/réalité, passé/présent, désir/renoncement, réalisme/artificialité.
Par exemple, dans une scène, Mastroianni et Schell se rendent au dancing où ils se lancent dans un rock improvisé. La jeune femme, timide et peu habituée à ce genre de lieu est confrontée à une jeunesse plus frivole dont elle ne possède pas les codes, tandis que Mastroianni tente de la séduire à travers une chorégraphie tout aussi impressionnante que ridicule. La rigueur de la mise en scène et la finesse de la direction d’acteur rendent cette séquence tout à la fois exemplaire d’intentionnalité et d’une justesse dramatique saisissante (tout en tenant compte de la désinvolture dont pouvait jouer Mastroianni). C’est un des troubles et des plaisirs qu’offre le cinéma de Visconti : toucher la surface, atteindre la profondeur. Surtout quand, ici, il s’agit des jeux de la séduction et de l’amour.
Informations pratiques
Sortie nationale le 26 février 2020