Publié le mercredi, 11 janvier 2023 à 09h26
L’Immensità d’Emanuele Crialese. Huis clos familial
L’immensità réussira-t-il à égaler le succès de Respiro ? En dépit des différences évidentes entre les deux actrices, la jeune et déjà talentueuse Valeria Golino (Respiro est sorti il y a vingt ans) et la star Penelope Cruz, les deux personnages principaux ont plusieurs points en commun. Si les lieux, les temps et les milieux où les deux histoires se déroulent sont carrément aux antipodes, l’observateur attentif décernera cependant d’évidentes similitudes entre les deux long-métrages. Tout d’abord, un personnage féminin fort, central dans les deux cas. La matrice est probablement la même. Une femme libre, excentrique et malheureuse qui crée autant d’incompréhension et de réprobation parmi les rustres pêcheurs de Lapendusa (Respiro) que dans la riche et élégante bourgeoisie romaine des années 1970 (L’immensità). Et puis le mari, incarné par Vincenzo Amato dans les deux films, un homme borné et violent.
Mais de quoi parle L’immensità ? Nous sommes à Rome dans les années 1970. Un appartement bourgeois dans un beau quartier, une famille aisée, Clara et Felice Borghetti ont trois enfants (comme dans Respiro !) et ne s’aiment plus. Clara voudrait divorcer mais son mari y est farouchement opposé. Felice est souvent absent et pas toujours pour le travail. Il a plusieurs maîtresses. Clara, d’origine espagnole, est malheureuse et trouve refuge dans la relation complice qu’elle entretient avec ses trois enfants. L’aînée, Adriana 14 ans, est née dans un corps qu’elle ne reconnaît pas. Elle préfère se faire appeler Andrea (prénom masculin en Italie).
Empathique, Clara tente d’aider sa fille. Elle comprend ses difficultés et ses souffrances. Le père, en revanche, très attaché aux convenances bourgeoises de son riche milieu, considère son attitude une lubie d’adolescente. Et une honte vis à vis des amis et des parents.
C’est un film qui pose des questions fortes et importantes. Des plaies ouvertes qui déchaînent toujours les passions, à cinquante ans de distance : les violences conjugales et l’acceptation d’une sexualité non binaire. Portés par la mère et la fille, ces deux thèmes ont souvent du mal à se dissoudre dans l’histoire ce qui nuit à l’unité de la narration. La prestation de Penelope Cruz est à la hauteur de sa réputation. Moins convaincants sont les autres personnages qui restent empêtrés dans des rôles sans nuances. Leur manque de complexité et de profondeur, de « zone grise » selon la définition de Primo Levi, les rend malheureusement prévisibles.
Informations pratiques
- L’Immensità d’Emanuele Crialese au cinéma le 11 janvier 2023