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Publié le lundi, 5 juillet 2021 à 09h45

Je voulais me cacher de Giorgio Diritti au cinéma

Par Amélie Ravaut

Elio Germano est Ligabue dans Je voulais me cacher

Volevo nascondermi, avec son stupéfiant Elio Germano, sort au cinéma ce mercredi 7 juillet 2021. Vainqueur de sept David di Donatello et du prix d’interprétation masculine pour Germano au Festival de Berlin, le film retrace une partie de la vie du peintre et sculpteur italien Antonio Ligabue. Figure énigmatique au destin complexe, autodidacte que l’on a souvent rapproché du Douanier Rousseau, Ligabue est un des maîtres de la peinture « naïve ». Néanmoins, Volevo nascondermi n’est pas un biopic au sens classique : Diritti se concentre essentiellement sur la vie d’adulte et « artistiquement productive » du peintre.

En effet, les vingt premières minutes du film, qui retracent l’enfance et la jeunesse difficiles de Ligabue, sont mises en scène depuis un point de vue relativement complexe à cerner mais qui pourrait s’apparenter à des réminiscences assez cauchemardesques. Il s’agit de scènes courtes, elliptiques et morcelées, à la chronologie non linéaire et dont certaines séquences se répètent depuis des angles différents. Une enfance d’orphelin, de moqueries, de séjours en institution, de rejet, de laideur et de manque.

C’est dans cette ouverture que le motif de l’enfance dissimulée apparaît, notamment par le biais du personnage caché qui scrute au travers d’un interstice, mais c’est aussi et surtout, par l’intermédiaire de l’image, qui semble voilée et faisant l’objet d’un vignetage. Un effet intriguant mais intéressant pour le spectateur qui est alors immergé dans cette atmosphère où la visibilité et les perspectives de vie sont obstruées. Comme l’indique Diritti, le titre du film « je voulais me cacher » laisse place, par sa suspension et sa mise en mouvement, au fait que, non, finalement, Ligabue, choisira de se montrer au monde et de nous montrer son monde, quoiqu’il en coûte.

Expulsé de Suisse où il a grandit, Ligabue est envoyé à Gualtieri, en Emilie Romagne. Il y passe pour le fou du village et vit une existence misérable avec pour seul logis un cabanon dans un bois sur les rives du Pô. A la fin des années 1920, ayant pressenti sa sensibilité artistique, le peintre et sculpteur Mazzacurati, le recueille, l’héberge et l’initie à la peinture. La suite du film rend compte de l’évolution personnelle et artistique de Ligabue, de sa reconnaissance grandissante et de ses rencontres amicales.

Mais Diritti filme, et à juste titre, avec la même sincérité et délicatesse qu’Elio Germano interprète son personnage : le sentiment d’appartenance ou de rejet est une question de regard. C’est pourquoi Volevo nascondermi est empreint d’une grande exubérance et d’une vitalité enfantine qui, en même temps, sont très triviales et amères. La transformation physique et le travail de composition de l’acteur sont effectivement troublants, de par la ressemblance qu’ils induisent avec Ligabue (Diritti et Germano ont travaillé d’après des images filmées du peintre et des témoignages de proches) mais aussi par l’expressivité et la force du regard de Germano. La mise en scène et l’interprétation se concentrent sur le point de vue, sur les échanges de regard, sur l’expression des visions imaginaires et fantasmées mais aussi sur l’autre face du regard : celui qui juge les apparences, qui exclu, qui amoindri. Alors, oui, Volevo nacondermi est un film sur le peintre Ligabue, mais c’est aussi, comme le résume le réalisateur « tendre un miroir à nous tous ».

Informations pratiques
  • Au cinéma à partir du 7 juillet 2021

Lien vidéo Facebook (bande annonce) : https://www.facebook.com/140878217097/videos/829847774583674

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