Divin Moyen Âge de Alessandro Barbero

Par Stefano Palombari

Six portraits de personnalités emblématiques du Moyen Âge esquissés sur la base de témoignages directs. Des vies exceptionnelles pour certains, plus banales pour d'autres. L'idée est de donner un aperçu de la vie quotidienne au Moyen Âge. Une histoire tracée à l'horizontale, à la hauteur de ses protagonistes.

Mais qui sont donc ces protagonistes ? Par souci d'égalité, l'auteur à choisi six hommes et six femmes. C'est dans l'air du temps, de notre temps. Quant à ces temps-là, la condition féminine était bien différente par rapport à nos jours mais pas autant qu'on pourrait le croire. A la Renaissance la situation a empiré sensiblement.

La prose élégante d'Alessandro Barbero, spécialiste de la narration historique, plonge le lecteur in medias res. On suit d'abord les péripéties de Salimbene de Parme qui décida d'entrer chez les Franciscain contre la volonté de sa famille. Une riche et puissante famille de l’aristocratie de Parme. Par le biais de ses Chroniques, un ouvrage monumental, le lecteur peut se régaler de ses observations souvent ironiques et moqueuses, de ses jugements hautains et ses commentaires condescendants sur les personnages en vue de son époque.

Le mérite de l'auteur est justement d'avoir choisi des personnalités fort différentes. Le noble Salimbene de Adam est suivi par Dino Compagni, un commerçant florentin, politiquement engagé, représentant du « Tiers État » qui se bat pour une participation plus élargie aux instances administratives de la ville. C'est la guerre entre Guelfes et Gibelins d'abord et entre Guelfes noirs et blancs ensuite. La victoire des Guelfes noirs, le parti de la noblesse, poussa plusieurs marchands à quitter la ville.

Le troisième « garçon » est un Français : Jean de Joinville. Ami intime du roi Louis IX, Saint Louis, il écrivit Vie de Saint Louis « texte fondateur de la littérature médiévale ». Il fut le premier à faire usage du « je ». Jean était un valeureux chevalier qui suivit Louis IX à la croisade de 1248.

Concernant les filles, les marges de manœuvre de l'auteur étaient bien plus minces. Pas beaucoup de femmes avaient eu la chance d'être connues à l'époque. Les sources ne sont pas très bavardes sur la gente féminine.

Le choix de l'auteur se porte sur une italienne, une française et une italo-française. Égalité parfaite. Leur parcours est tout à fait exceptionnel, rien à voir avec la plupart des femmes de l'époque, dont la vie se résumait à leur rôle de mère et épouse.

La première est Catherine de Sienne, la sainte au caractère bien trempé, morte très jeune à cause des souffrances qu'elle même s'était infligées. Son influence politique est indéniable. Ses lettres aux puissants (papes, cardinaux, rois) en sont une preuve évidente.

La deuxième est écrivaine : La franco-italienne Christine de Pizan. Née en Italie, elle vécut presque entièrement en France. Ses livres, malgré les difficultés dues à l'absence de l'imprimerie, qui n'avait pas encore été inventée, étaient des véritables best-sellers, comme le Livre de l'advision Christine et La Cité des Dames, l'un des premiers manifestes féministes.

Quant à la troisième, Jeanne d'Arc, elle est la plus connue des trois, notamment en France. Son histoire et ses actes font partie intégrante de l'Histoire de France. Parmi les sources utilisées par l'auteur, les lettres que Jeanne dicta, étant la pucelle totalement analphabète. Une bonne partie du chapitre est consacrée au procès fait à Jeanne d'Arc. L'accusation principale, ce qui détermina la peine capitale, reposait sur son obstination à porter des habits masculins. Elle y renonça ? Si oui, pourquoi elle ne tint pas sont engagement ? Autant de questions auxquelles Alessandro Barbero tente de donner son point de vue.

Comme pour les autres ouvrages du même auteur, Divin Moyen Âge, est une opération de divulgation historique très intéressante. Un véritable livre d'histoire, avec sources à l’appui, dont la prose agréable en fait presque une lecture de chevet.