Archives Cinéma

Publié le mercredi, 29 janvier 2014 à 08h45

Un homme d’église en crise

Par Emilie Voisin

film de ermanno olmi, le village de carton

« Si tu n’ouvres pas aux autres ta maison intérieure, tu n’arriveras à rien, et il n’y a que de la rencontre avec l’autre que peut venir le salut. Sans les autres, nous ne sommes que des hommes de carton » (Ermanno Olmi au 68ème Festival de Venise).

Le vieux prêtre que nous découvrons a l’air d’un homme de carton, bouleversé et désemparé face à la désacralisation de son église : au moment où la grue fait choir le Christ, c’est la fin d’un monde, la fin de son monde. Ses convictions quant à sa vocation et quant au sens qu’il donnait à sa foi, tombent une à une, à mesure que les ouvriers démantèlent l’église… jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien.

Sauf l’indispensable peut-être : le « superflu » parti (le décor est d’ailleurs minimaliste, se limitant à l’église et la paroisse), c’est un groupe d’immigrés qui trouve refuge dans le bâtiment. L’église dépouillée de son « apparat symbolique » retrouve ses valeurs fondatrices : l’hospitalité et l’aide aux nécessiteux.

Et c’est ce paradoxe que filme Olmi. Qu’en aurait été t-il si l’église était restée intacte, si le prêtre n’avait pas été ébranlé dans ses certitudes ? Les aurait-il accueilli selon la religion catholique, serait-il allé contre la loi qui punit la complicité avec les clandestins ?

Le doute reste mais le réalisateur semble vouloir montrer que c’est une église qui ne l’est plus « officiellement » qui peut enfin revenir au message originel du Christ et accueillir dans toute sa compassion et sa miséricorde ces hommes, femmes et enfants dans une grande détresse.

Michael Lonsdale incarne avec beaucoup de sobriété et d’émotion cet homme d ‘église en proie aux doutes mais qui retrouve le sens de son engagement, après de longues années de pratique et peut-être d’une certaine « torpeur », avec l’arrivée de ces réfugiés qui secouent sa foi.

Le film présente à mon sens quelques longueurs mais il nous offre une vision contemplative et réfléchie sur la position de l’église (et plus généralement de nous tous citoyens) face aux drames actuels et face aux valeurs intemporelles telles que la solidarité et l’assistance.

Critique du film Le village de carton