Archives Jazz

Publié le mercredi, 15 mai 2013 à 18h30

Francesca Foscarini et Barokthegreat aux Rencontres Chorégraphiques de Seine-Saint-Denis

Par Karima Romdane

Les Rencontres Chorégraphiques de Seine Saint Denis se poursuivent jusqu'au 13 juin 2013, avec Francesca Foscarini et Barokthegreat les 5 et 6 juin à 20h aux Laboratoires d'Aubervilliers. Ce festival a pour vocation de révéler la nouvelle génération de chorégraphes contemporains. 23 œuvres d’artistes de territoires culturels et géographiques différents seront présentées tout le long de la manifestation dans 11 théâtres du département.

Fidippide par Barokthegreat
Un corps se lève, en débardeur couleur chair et pieds nus, cheveux tirés en arrière. Il s’avance et bouge au rythme régulier, imperturbable des percussions de Leila Gharib. Intitulé Fidippide en référence au messager grec Phidippidès qui aurait parcouru les quarante-deux kilomètres séparant Marathon d’Athènes pour annoncer la victoire contre les Perses en 490 avant J.-C., Barokthegreat propose un solo qui joue du mouvement jusqu’à l’exténuation – la légende veut que le fameux Phidippidès expirât à son arrivée, annonçant la bonne nouvelle dans un dernier soupir.
Sonia Brunelli s’attache en effet à déployer un mouvement patient et toujours recommencé, concentré sur la station debout, simplement tendu entre point de départ et point d’arrivée. Telle une vrille (la pièce a d’ailleurs failli s’appeler Trivella du nom désignant un outil d’artisan médiéval dont la fonction était de forer des trous dans le bois), Sonia Brunelli poursuit patiemment et inexorablement sa trajectoire. Elle accède ainsi à une dimension qui rappelle la transe et les rituels. Épousant les rythmes, elle danse comme on ferait une cérémonie d’envoûtement dans laquelle chaque élément jouerait une partition solitaire et pourtant nouée. La musicienne disparaît derrière un filament de lumière mais poursuit inlassablement les percussions, les trois projecteurs ramassés au milieu se font face, sculptures immobiles éclairant différemment le corps qui s’approche ou s’éloigne.
La chorégraphe compose ainsi une danse qui travaille le corps machine, robotique, et le corps matière sculpté par la lumière, en résonance avec la musique, percussions seules ou accompagnées de musique électro qui se risque à la mélodie, enveloppant la scène d’une dimension obsessionnelle. Le corps semble prendre son envol, mais reste cloué au sol. Messager condamné à courir, à errer, et à revenir à son point de départ, il obéit pourtant toujours à la loi du mouvement, machine musicale vivante et entêtée.


Pièce pour 1 danseuse et 1 musicienne. 2O min. Concept Barokthegreat. Chorégraphie, danse Sonia Brunelli. Musique originale sur scène Leila Gharib. Regard chorégraphique Marco Villari, Costumes Biscuit And Ball. Son Francesco « Fuzz » Brasini


Cantando sulle ossa par Francesca Foscarino
Dans la pénombre, un corps avance lentement, vêtu de gris, les mains dans les poches, tandis qu’une nappe sonore et sourde fait irruption. La lumière se fait sur Francesca Foscarini, jeune interprète et chorégraphe italienne. Elle avance, et la première chose qui frappe est l’expressivité de son visage, un visage comme absent, idiot, vidé de sa pensée, entre étonnement et crainte, cherchant autour de lui des appuis, ce même visage qui finira par disparaître, masqué par une chevelure lâchée, comme on lâcherait le signe le plus tangible d’une identité ferme et bien établie.
Les appuis ce sont alors ses pieds, tordus, aux orteils déployés, et des mains, qui se tendent essayant d’attraper quelque chose – mais quoi ? Que se passe-t-il quand la volonté abdique et que le corps se laisse guider par le mouvement ? Que se passe-t-il quand le corps s’offre le plaisir de se perdre ou d’être perdu dans l’immensité et le vide de l’espace ? Voilà les questions à partir desquelles Francesca Foscarini a construit son solo. On pourrait les prolonger par « Qu’est-ce que mon corps ? Où suis-je dedans ? » tant celui qu’elle offre sur le plateau est un corps qui lui semble étranger mais qui lui reste à explorer, un corps articulé, anguleux, sans cesse à redécouvrir. Des mains qui n’arrivent pas à s’extirper de poches, des pieds rentrés, des étirements qui semblent être là pour s’assurer qu’elle est en possession d’elle-même, des essais de gestes, des mouvements soudain heurtés, un corps qui joue de la cassure, « du cliquetis des os », qui se jette au sol, brinqueballé : Francesca Foscarini joue ainsi de l’étrangeté, parfois réjouissante parfois inquiétante, de ce corps libre et contraint, et lorsqu’à un moment le souffle et la voix se font entendre, on ne sait pas bien s’il s’agit de rires ou de larmes. Car comme le décrit Donald Woods Winnicott, « il faut admettre que le jeu est toujours à même de se muer en quelque chose d’effrayant. »


Solo 15 min. Chorégraphie, interprétation Francesca Foscarini. Tiziano Ruggia (Lumières), Federica Todesco (Costumes)

Au même programme : Danya Hamoud (Liban), Lucy Suggate (Royaume-Uni / Danemark) et Fatou Cissé (Sénégal)

Pour en savoir plus : www.rencontreschoregraphiques.com

Informations pratiques
MC93 Bobigny-Salle Oleg Efremov
41, rue Lécuyer 93300 Aubervilliers. (M° Aubervilliers - Pantin Quatre Chemins, sortie Avenue de la République, côté numéros pairs). Billetterie 01 55 82 08 01. Plein Tarif 16€, tarif réduit 12€ (habitants de la Seine-Saint-Denis,-26 ans, étudiants, demandeurs d'emplois, bénéficiaires du RSA, intermittents du spectacle, +60 ans, abonnés du CND, abonnés du MAC/VAL, abonnés du Goethe Institut Paris)
Dates : Mercredi 5 et jeudi 6 juin 2013 à 20h

Tarif préférentiel pour nos internautes 12€ au lieu de 16€
Réservez en indiquant le code "Italie à Paris" au 01 55 82 08 01

Filippide
Les laboratoires d'Aubervilliers, 5 et 6 juin 2013 Tarif préférentiel