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Publié le mercredi, 18 février 2009 à 19h10

Giorgio de Chirico. La fabrique des rêves

Par Ilaria Venneri

A 25 ans de la dernière grande rétrospective au Centre George Pompidou, le musée d'Art Moderne de la Ville de Paris, consacre une nouvelle et grande exposition à Giorgio De Chirico, artiste majeur de la scène artistique internationale.
L'exposition raconte, à travers un corpus de cent-soixante-dix chefs d'œuvre, provenant de musées internationaux et de plusieurs collections privées, le parcours de cet extraordinaire artiste dont l'œuvre se caractérise pas vraiment par une recherche qui aboutisse à l'innovation formelle, mais plutôt, par une manière nouvelle soit de regarder les objets et la nature tout court soit d'enquêter sur leur signification, la plus profonde et la plus cachée. Un nombre décidément important d'œuvres qui nous introduira dans l'univers métaphysique de De Chirico, maître déclaré du mouvement surréaliste. L'exposition vise à présenter au public français l'œuvre toute entière de De Chirico, de ses débuts symbolistes à sa période métaphysique, des mannequins à la période baroque.

C'est un voyage tout au long de son œuvre pour comprendre un des maîtres qui ont révolutionné l'art moderne en élaborant de nouveaux codes linguistiques et visuels. Les thèmes fondamentaux de sa peinture sont l'homme seul face à l'infini, les éléments vivants qui se métamorphosent dans la fixité de la statue, la solitude d'immenses perspectives inhabitées, ainsi que le voyage, la mythologie, l'autoportrait. Peintre de l'énigme, de la tragédie et, par dessus tout, du dépaysement à entendre ceci comme rupture avec les codes ordinaires avec lesquels on perçoit le réel.

De Chirico nous a appris à regarder la réalité d'une façon tout à fait différente, d'une façon « métaphysique » une invitation au voyage au delà de la dimension physique des choses. Dans cette dimension renouvelée du réel, les espaces en renonçant aux catégories de vraisemblance et congruence, se peuplent mystérieusement de figures inquiétantes, d'éléments qui dialoguent entre eux par opposition, par incongruité, éléments jaillissant du rêve, du souvenir, de la sensation au dessus de tout.

De Chirico peintre italien, mais pas seulement. En effet il naît à Valos, île du Péloponnèse, d'où il puisera tout un complexe univers mythologique qu'il saura adapter à son époque parvenant à la définition d'une énigmatique mythologie suspendue entre passé et présent. Par la suite il se rend à Munich ce qui représentera une autre étape aussi importante pour sa formation. En Allemagne le jeune artiste se rapprochera de la philosophie de Nietzsche, Schopenhauer, Weininger, ce qui donnera à son œuvre un caractère essentiellement philosophique. Ici il est également foudroyé par le peintre Arold Boeklin, ce qui explique la tendance symboliste de ses tableaux de cette époque.

Entre 1911 et 1915 il s'installe à Paris. Proche d’Apollinaire et de son cercle (Picasso, Picabia, Derain etc), la présence de De Chirico aura d’immédiates résonances sur le mouvement surréaliste au point que André Breton verra en De Chirico le démiurge d'une moderne mythologie. Cependant, au début des années Vingt, la peinture de De Chirico semble prendre une autre voie. Il se dégage du débat né autour de l'art moderne (soutenu notamment par les avant-gardes) pour répondre à l'appel du « retour à l'ordre ». Les surréalistes ne lui pardonneront jamais ce volte-face, de plus, leurs positions méprisantes contribueront à estimer comme digne d'intérêt seulement l'œuvre dechirichienne avant les années Vingt, considérée comme la « bonne manière » en l’opposant à la « mauvaise » qui, en terme de temps, correspondrait à une phase comprise entre 1922, environ, et 1978, année de sa mort!



Au cours des années, les esprits apaisés, on a commencé à envisager l'œuvre dechirichienne d'une façon plus détachée et objective.

Et c'est essentiellement pour cette raison que l'exposition parisienne est d'autant plus importante et ambitieuse, car elle nous offre la possibilité de découvrir l'œuvre toute entière de De Chirico et de s'en approcher avec un regard dépourvu de préjugés idéologiques, pour que l'on puisse saisir toute l'originalité, la cohérence ainsi que la complexité d'un engagement artistique que De Chirico a poursuivi pendant toute son existence. Engagement, passion et amour tous les éléments dont De Chirico a pénétré sa peinture, une peinture qui n'a jamais cessé de poser des énigmes.

Informations pratiques
Musée d’Art moderne de la Ville de Paris
11 avenue du Président Wilson 75116 Paris
Tél. 01 53 67 40 00, site : www.mam.paris.fr
Dates : Du 13 février au 24 mai 2009 , du mardi au dimanche de 10h à 18h. Nocturne le jeudi jusqu'à 22h.
Giorgio de Chirico. La fabrique des rêves
Musée d’Art moderne de la Ville de Paris,jusqu'au 24 mai 2009