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Publié le vendredi, 23 avril 2010 à 10h44

Così fan tutte de Mozart, livret de Lorenzo Da Ponte

Par Karima Romdane

Le propre des plus grands chefs-d’œuvre est de se jouer avec bonheur des approches interprétatives les plus inattendues. Dans cette juvénile et inventive production du célébrissime ouvrage de Mozart (et de son génial alter ego le librettiste Da Ponte), l’orchestre symphonique devient petit ensemble à vents – selon l’effectif instrumental de la Gran Partita KV361 – et l’action se déplace des jardins napolitains du XVIIIe siècle à un collège anglais des années 1930… Et pourtant, la magie et la malice de ce grand Cosi devenu « opéra de chambre » continuent de fonctionner à merveille. S’appuyant sur une équipe de chanteurs magnifiques de fraîcheur et de vie, le metteur en scène Yves Beaunesne concentre le message de cette cruelle et joyeuse confrontation entre femmes volages et hommes menteurs sur « des questions qu’elle pose sur la proximité infernale entre le sentiment feint et le sentiment réel, sur le trouble et la sincérité »

Mozart composa Così fan tutte, commande de cour pour le Burgtheater de Vienne, durant l’automne 1789, époque troublée sur le plan politique bien sûr, mais aussi personnel : son père adoré et plusieurs de ses amis viennent de mourir, ses finances sont au plus mal, sa femme, enceinte, est malade et souvent absente et sa propre santé précaire. Mais ce sont particulièrement les questions d’amour, de mariage et de fidélité qui le hantent. Mozart et Da Ponte font ici la guerre à l’amour utopique et au sentimentalisme : le sentimentalisme consistant à nier l’ambivalence de la vie, il établit une émotion fausse, un partage au mauvais endroit, c’est-à-dire entre celui qui est sauvé et celui qui ne l’est pas. On ne peut pas aimer et sentimentaliser en même temps : l’amour, semble nous dire Mozart, c’est être aux côtés de quelqu’un qui est hors de soi. Si on sentimentalise l’autre, on le réduit à une projection de ce qui est en soi, on ne peut plus vraiment le voir. Mozart part de ce qu’il connaît : sa faiblesse humaine, son désir que l’amour demeure, son refus de l’illusion narcissique, sa quête du don et du pardon : il faut avoir fait l’expérience de sa propre fragilité et de celle de l’être aimé pour avancer vers l’amour fidèle. Depuis longtemps, il ne croit plus qu’un homme puisse comprendre un autre homme sans avoir connu les mêmes souffrances.

S’il y a masque ou déguisement, ce n’est jamais que pour les faire tomber et montrer, derrière le tout blanc ou le tout noir, derrière le tout bon ou le tout mauvais, le spectre de l’âme humaine. L’activité est un masque que nous utilisons pour recouvrir le vide. Mais c’est ce vide qui est intéressant, c’est dans les temps morts que l’on découvre son identité. Et le poids de la musique, qui donne la vérité intérieure, contredit à chaque note l’apparence de divertissement. On comprend mieux le sous-titre de l’œuvre : L’Ecole des amants. Le réel, c’est l’illusion de la pure vertu, le possible, c’est que le bonheur est à portée de la main pour peu qu’on y mette le prix fort.

Ensemble PhilidOr : Fondé en 1992, l’Ensemble PhilidOr prend modèle sur la tradition des ensembles d’instruments à vent des époques baroque et classique. Soucieux de rendre à la musique ses couleurs et ses saveurs originelles, l’Ensemble PhilidOr défend les nouveaux répertoires des musiques anciennes par des programmations originales et variées en direction de publics toujours plus curieux. De Dreux à Versailles, de la Cour au Concert Spirituel, instrumentistes à vent, copistes ou bibliothécaires, la dynastie PhilidOr a traversé les 17ème et 18ème siècles au service de la musique vocale et instrumentale, portée par le souffle des Lumières, témoignant ainsi avec force de la vitalité artistique et intellectuelle en France et en Europe.


Opéra de Wolfgang Amadeus Mozart durée 3h30 avec entracte - A partir de 12 ans. Livret de Lorenzo Da Ponte. Adaptation, Ensemble PhilidOr d’après l’effectif instrumental de la Gran Partita pour instruments à vent, KV 361, François Bazola, direction musicale ; Yves Beaunesne, metteur en scène ; Ensemble PhilidOr. Avec : ''Fiordiligi'', Magali de Prelle ; ''Dorabella'', Amaya Domínguez ; ''Despina'', Mélanie Gardyn ''Don Alfonso'', Lionel Peintre, Jacques Bona (en alternance) ; ''Ferrando'', Julien Behr, Antonio Figueroa (en alternance) ; ''Guglielmo'', Marc Mauillon, Christophe Gay (en alternance)
Informations pratiques
Théâtre de Suresnes Jean Vilar plan d'accès
16, place Stalingrad - 92150 Suresnes Tél. 01.41.18.85.88
www.theatre-suresnes.fr
Dates : Vendredi 7 mai 2010 à 21h Tarif préférentiel pour nos internautes 18€ au lieu de 25€
pour obtenir la réduction réservez de la part de l'Italie à Paris par téléphone au 01 41 18 85 88 du mardi au samedi de 13h à19h, imprimez cette page et présentez-la à la caisse

Le théâtre met à la disposition de son public une navette gratuite au départ de Paris, angle de l’avenue Hoche et de la Place de l’Etoile, ¾ d’heure avant le début de la représentation. Le retour est assuré.
Le parking gratuit, à l’arrière du théâtre, ouvre ses portes une heure avant la représentation.

così©Delahaye
Théâtre de Suresnes Jean Vilar, 7 mai 2010 tarif préférentiel