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Malacarne de Giosuè Calaciura

Ce n'est pas un véritable roman, dans le sens du roman polyphonique, mais un long monologue. Un malacarne, petit tueur de la mafia, règle ses comptes avec son propre passé et avec la mafia, en s'adressant à un fantomatique juge, une sorte de divinité muette.

Chaque chapitre s'ouvre avec la même phrase Nous n'étions plus rien et en effet la réalité et la matière se raréfient au fur et à mesure que la narration avance. Ce crescendo d'improbabilités débauche sur le plus total chaos onirique. Tout est observé à travers le verre déformant de l'hyperbole, la seule contrainte littéraire que s'est fixé l'auteur.

Le narrateur parle d'ambassadeurs américains qui sortent du sous-marin pour commander l'homicide de 10 politiciens importants, d'explosions qui déchiquettent même le souvenir de la personne, de dissolutions à la chaîne de personnes encore vivantes dans l'acide, de balles qui tuent avec des rebondissements dignes des boules de billard, de mafieux qui se prennent pour Jésus et qui ressuscitent trois jours plus tard.

Le malacarne devient le symbole même de la folie mafieuse. Une folie qui transforme l'obsession du meurtre en suicide, l'appétit en cannibalisme. Avec ses aveux, ce petit truand raconte son propre parcours personnel qui s'universalise dans la description du système mafieux dans toutes ses déclinations et métamorphoses.

Ce petit livre qui ne fait que 175 pages est très dense à cause de son ton imprégné de lyrisme et d'un langage très recherché. Une mention pour la traductrice qui a su rendre en français la musicalité et les effets euphoniques de l'enchaînement des mots. Même s'il faut avouer que le rêve se change parfois en cauchemar et l'attention du lecteur a tendance à s'envoler avec la matière.

Stefano Palombari