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Fils de personne - Roberto Alajmo

La famille, mode d'emploi

Le rideau se lève sur la scène du crime. Le père est allongé par terre dans une flaque de sang, la femme et les parents de la victime s'affolent autour du cadavre, Tancredi, le fils, est enfermé dans la salle de bain.
Tout de suite on voit apparaître les rapports de force à l'intérieur de la famille. C'est Rosa la grand-mère qui tire les ficelles. C'est elle l'autorité reconnue des Ciraulo. Celle qui résout les problèmes quand ils se présentent. C'est l'un de ces personnages féminins de caractère qui règlent la vie des familles dans le sud de l'Italie que Alajmo sait si bien décrire. Dans Un Coeur de mère, son roman précédent (Rivages 2005), c'est justement la mère de Cosimo qui tient ce rôle. Les hommes, dans l'univers de l'écrivain sicilien, ont toujours des côtés enfantins très marqués. Ils n'arrivent jamais à mûrir ce qui nécessite une présence féminine forte pour pouvoir affronter les imprévus de la vie.

Les Ciraulo, leurs amis et leurs voisins, deux catégories qui souvent coïncident, habitent la Kalsa, quartier pauvre de Palerme. Ils ne vivent pas, ils survivent et ça leur suffit. Leur existence est faite de petits boulots, pas toujours honnêtes, de subventions qui suffisent tout juste pour joindre les bouts. Ils n'ont aucune inspiration aucune ambition.

Alajmo est un maître dans la description d'existences dépourvues de tous sentiments. L'univers dans lequel les personnages agissent est une sorte d'utilitarisme triomphant. Il pousse à l'extrême les égoïsmes déjà présents dans notre société. Les rapports humains, notamment ceux de parenté, se réduisent ainsi à des rapports purement techniques. Ce qui leur permet aussi de monnayer même un drame terrible comme le décès d'un enfant. L'argent reçu servira pour acheter une bagnole, une magnifique Volvo noire. La bagnole qui sera à l'origine du meurtre.
Stefano Palombari

Le Mot de l'éditeur

Dans un appartement de la Kalsa, quartier populaire de Palerme, Tancredi, enfermé dans les toilettes, retient son souffle. Son père gît sur le sol du salon. Mort. La police va arriver, cuisiner la mère, le grand-père, la grand-mère, interroger les voisins. S'étonner aussi de la superbe Volvo noire garée devant la porte de l'immeuble. Tancredi craint ce qui l'attend.

Acide, jubilatoire, le nouveau roman de Roberto Alajmo est aussi puissant et efficace que le précédent. Avec cette écriture si particulière qui est la sienne : lisse, dénuée de morale et de recul, naturaliste en apparence, il exhume sans ciller le fatras de mauvais sentiments, bonnes raisons et vieilles habitudes qui agite une famille ordinaire confrontée à l'imprévu. Les Ciraulo ont en effet décidé de sauver les meubles coûte que coûte dans cette affaire. Quitte à s'arranger avec la mort, quitte à faire du fils un héros nécessaire.

Après Un coeur de mère, Roberto Alajmo, né en 1959 à Palerme, poursuit, dans le registre typiquement sicilien de la arce noire, sa très contemporaine Comédie Humaine...

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