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Publié le dimanche, 26 mars 2017 à 10h25

L’affaire de la pucelle de la rue Ormea de Amara Lakhous

Par Stefano Palombari

L’affaire de la pucelle de la rue Ormea - couverture

On pourrait dire qu’Amara Lakhous est la version littéraire de Lina Wertmüller. L’écrivain et la réalisatrice ont en commun les titres à rallonge, les thèmes d’actualité et une évidente fibre sociale. La comparaison s’arrête là. Les « polars » de Lakhous se suivent chronologiquement, tels une série littéraire. Chacun s’appuie sur le précédent tout en gardant une vie totalement autonome.

Dans L’affaire de la pucelle de la rue Ormea on retrouve donc le journaliste Enzo Laganà et ses questionnements sur l’éthique professionnelle. Ses articles sont régulièrement retouchés, sans son consentement. Cette affaire, qui se révélera totalement bidon, constitue un exemple ultérieur de la tendance des médias à la simplification. L’habitude à décomplexifier le réel a comme première conséquence la facilité à désigner des boucs émissaires. Ce sont toujours les cibles les plus faciles, celles qui font déjà l’objet de stigmatisations récurrentes, et qui donc, dans l’imaginaire collectif, deviennent les coupables idéaux.

La nouvelle de la pucelle violée par des méchants tziganes, bien que totalement fausse, assume tout de suite le statut de vérité incontestable. Au point que personne ne juge nécessaire l’effort de chercher quelques preuves ou du moins quelques indices avant de les mettre au pilori médiatique. Pas très surprenant pour une société nourrie des peurs alimentées par une presse complaisante, pour ne pas dire carrément complice.

Bien que tous les ingrédients des précédents romans de Lakhous soient présents, L’affaire de la pucelle de la rue Ormea a du mal à décoller. Pas mal de déjà-vus au programme d’un roman décousu et souvent ennuyeux. La lecture est régulièrement alourdie par des tirades théoriques qui restent en suspension. La subtile alchimie littéraire qui permet de faire passer des messages sans compromettre le flux de la narration, de les fusionner totalement dans l’intrigue au point de ne plus en déceler les molécules, n’a visiblement pas touché ce roman. Des gros grumeaux théoriques comme l’harangue, très juste, sur les banques, sont difficiles à digérer car ils cassent le rythme et apparaissent comme des juxtapositions artificielles, des corps étrangers.

Informations pratiques

L’affaire de la pucelle de la rue Ormea de Amara Lakhous, Actes-Sud, 20,80€
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