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Publié le dimanche, 7 avril 2013 à 16h46

Cinéma / Paysages. Carnet de notes pour un film sur le Pô, de Thierry Roche

Par Francesco Romanello

Carnet de notes pour un film sur le Pô - Thierry Roche

La grisaille de la plaine du Pô est depuis toujours une minière d’inspiration inépuisable pour maints cinéastes italiens. C’est dans l’espace suspendu du delta du plus grand fleuve italien qu’ont été imaginées quelques-unes des histoires les plus marquantes du cinéma transalpin: pensons à ce chef-d’œuvre qui est Il Grido (Le Cri, 1958) de Michelangelo Antonioni, aboutissement suprême de la recherche stylistique initiée par le maître de l’incommunicabilité en 1943, avec son documentaire Gente del Po. Mais pensons aussi à Ossessione (Les amants diaboliques, 1948) de Luchino Visconti, à La donna del Fiume (La Fille du Fleuve, 1954) de Mario Soldati avec Sophia Loren, ou encore au dernier épisode, le plus tragique, de Paisà de Roberto Rossellini.

C’est dans cette terre de brouillard, pluie, neige et boue que nous accompagne l’anthropologue Thierry Roche avec son ouvrage « Carnet de notes pour un film sur le Pô », nous guidant dans un voyage de la mémoire à la recherche de nos souvenirs cinématographiques les plus intenses.

Parti réaliser un film (jamais fini) sur la notion de paysage, qui aurait dû s'intituler Per fare un film sul grande fiume, l’auteur explore cette région fluviale de l’Emilie Romagne et nous expose sous la forme pasolinienne d’un carnet de notes, sa manière intime de penser et écrire sur le cinéma.

De Ermanno Olmi à Florestano Vancini, en passant par Vittorio De Seta, ce parcours est l’occasion pour réfléchir au rôle du paysage dans le cinéma comme âme même de ses personnages. Comme absorbés par le paysage, les personnages des films du Pô tendent à s’y confondre, à en devenir eux-mêmes un des éléments. Car pour suggérer la réflexion, la solitude et l’intériorité, il ne peut pas y avoir une toile de fond plus adaptée que la plaine du Pô, notamment l’hiver.

Dans cet espace qui ne connait d’autres tonalités que le gris, d’autres dimensions que le vide, le temps ne compte compte pas, il a une valeur propre, difficilement quantifiable. Ce n’est pas dans le temps que se déroule l’action. C’est à l’intérieur des personnages. La plaine du Pô est ainsi une tablette capable d’enregistrer toute les nuances d’une échelle chromatique qui est également psychologique.

Hanté par son amour pour Antonioni (de Deserto Rosso à Aldilà delle Nuvole), Thierry Roche évoque, entre récits et photos, une galerie d'histoires et personnages déracinés qui tracent la trajectoire d’une nouvelle forme de cinéma: le néoréalisme intérieur.

Informations pratiques
Cinéma / Paysages. Carnet de notes pour un film sur le Pô
Auteur : Thierry Roche
Éditeur: Yellow Now / Côté cinéma
Prix : 19 €