Le bruit de tes pas, roman de Valentina D'Urbano

Par Stefano Palombari

Mais qu'arrive-t-il à la jeune génération d'auteures italiennes ? Silvia Avallone, Viola Di Grado l'année dernière et maintenant Valentina D'Urbano... Elles n'ont pas la trentaine et manient le sordide avec la désinvolture d'un vieux routier. Après Piombino et Leeds voici « la forteresse », quartier de la banlieue de Rome qui nous plonge dans un décor à la Brutti, sporchi e cattivi (Affreux, sales et méchants).

« La forteresse » a ses règles qui ne coïncident que rarement avec celles du reste du pays. Aucun locataire ni propriétaire n'y habite. Que des squatteurs. Tout le monde est pauvre et survit comme il peut. Dans ce contexte, Beatrice et Alfredo, deux adolescents, ont grandi dans une sorte d'étrange symbiose. Ils sont inséparables au point qu'on les surnomme « les jumeaux ». Les parents de Beatrice se débrouillent pour offrir un semblant de vie normale à leurs deux enfants. Alfredo, en revanche, vit avec son grand frère et son père, un ivrogne qui les frappe régulièrement.

Avec une surprenante maîtrise de l'outil littéraire, la jeune romaine conduit le lecteur dans cet enfer de ciment qui de lieu de résidence se mue en destin. On ne s'échappe pas de la forteresse. Ceux qui y résident ont leur sort déjà tracé. La forteresse est une mère égoïste qui marque ses enfants à jamais.

Dans cette noirceur qui engloutie tout, objets et personnes, on perçoit un élément perturbateur : Le rapport qui lie Beatrice et Alfredo, empreint d'une affection profonde et inébranlable. Une lumière, une tache de couleur qui détonne, quelque chose d'unique et d'incompréhensible.

Le bruit de tes pas est un roman poignant, aux accents pasoliniens. La « forteresse » et sa faune montrent pas mal de similitudes, mutatis mutandis, avec les quartiers populaires de la Rome de Ragazzi di vita (Les Ragazzi) et de Una vita violenta (Une vie violente). Un texte captivant qui se lit avec plaisir et d'un seul trait.