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Publié le samedi, 11 décembre 2010 à 16h49

Nouvelle griffe pour Le Guépard - Le film de Visconti restauré

Par Francesco Romanello

Attention, chef d’œuvre! Dévoilé au dernier Festival de Cannes en version restaurée en présence de deux des interprètes principaux (Claudia Cardinale et Alain Delon), le Guépard renait à son immense splendeur. 47 ans après la Palme d’Or qui à l’unanimité le consacra comme l’un de plus grands monuments cinématographiques, le septième film de Luchino Visconti – son plus connu – ressorts en salle, en DVD et Blu-Ray à partir du 1er décembre, pour notre plus grand plaisir.

Pour ceux qui ne la connaissent pas, voici les lignes de l'histoire. Lorsque Garibaldi et ses chemises rouges républicaines se battent pour renverser l’ancien régime des Bourbons, l’aristocratie lutte pour ne pas mourir dans le paysage violent et ensoleillé de la Sicile de 1860.

Le film retrace avec un rythme fluvial le lent déclin de la noble maison de Don Fabrizio Corbero, prince de Salina (Burt Lancaster), et la montée en prééminence de Don Calogero Sedara, propriétaire foncier aux richesses aussi nouvelles que grandissantes. Le prince, lion fatigué, regarde de haut ces bouleversements politiques qui conduiront bientôt à l’unification de l’Italie et refuse de prendre des mesures actives pour enrayer le déclin de sa fortune ou pour aider à construire une nouvelle Sicile, mais son neveu Tancrède (Delon), beau et ambitieux, sait suivre la marée et, conscient que pour que tout reste comme avant, il faut que tout change, assure sa position en épousant Angelica (Cardinale), la fille bellissime de Don Calogero.

Le climax est atteint dans la séquence-fleuve du bal au palais Gangi de Palerme où Tancrède introduit Angelica à la société. Une nouvelle ère est née, et elle ne laisse rien présager de bon pour l'avenir.

Fresque somptueux et élégiaque sur une aristocratie aux abois, poussiéreuse et décoiffée par la force des nouveaux vents, lettre d’amour à un monde de lions et guépards en extinction, émergence de formes nouvelles de pouvoirs entre hyènes et chacals, Visconti retrouve ici ses thèmes de prédilection: la mélancolie et la désillusion face à un crepuscule que l’on sait inexorable.

Le travail sur les costumes et la reconstitution générale de l'époque sont absolument éblouissants. Les acteurs, tous rayonnants de beauté et justesse, répondent à l’intensité de l’histoire. Les musiques de Nino Rota, ainsi que la valse inédite de Giuseppe Verdi, sont tout juste philologiquement parfaites.

Il faut saluer cette formidable réédition du Guépard qui, grâce au travail de restauration de la Film Foundation de Martin Scorsese en association avec la Cineteca di Bologna et Gucci, retrouve ici ses couleurs magnifiques et ses détails minutieux jusqu’à la moindre palpitation des rideaux.

Pour ceux qui ne l’ont pas encore vu, cette merveille est à voir toute affaire cessante, de même qu’il est à lire le livre de Giuseppe Tomasi di Lampedusa dont Visconti fut un aussi remarquable adaptateur.

LE GUEPARD (Il Gattopardo, copie neuve en VO sous-titrée), film de Luchino Visconti avec Burt Lancaster, Alain Delon, Claudia Cardinale (1963).

Informations pratiques
La Filmothèque du Quartier Latin
9 rue Champollion - 75005 Paris, tél. 01 43 26 70 38
Dates : en salle jusqu’au 14 décembre 2010