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Publié le dimanche, 13 février 2011 à 10h26

Bonne conscience et mauvaises actions

Par Stefano Palombari

Ce film m’a rappelé la phrase de Giorgio Gaber, célèbre chanteur italien engagé, qui répondait aux questions récurrentes sur le danger de Berlusconi : « Je ne crains pas Berlusconi en soi mais Berlusconi en moi ». Susanna et Alfredo, elle psychologue et lui architecte, sont un exemple criant de la dangerosité de la victoire de l’esprit philistin. Ils essaient de résister, ils ont des sursauts d’orgueil mais finalement l’hydre à cent têtes de l’égoïsme ambiant finit pour avoir le dessus.

C’est la jeune Nadja, prostituée ukrainienne exploitée et battue par son maquereau, qui en fait les frais. Ce couple de romains raffiné, cultivé et de gauche la choisit pour régler les comptes avec leur propre conscience. Blottis dans leur maison rustique en Ombrie, où ils passent les vacances d’été, ils décident donc de faire la bonne action de l’année en sauvant la jeune fille, qu’ils ont vue maltraitée par son proxénète. Enfin, c’est Susanna qui décide et Alfredo qui exécute.

Tant que la jeune Nadja accepte d’être « la sauvée », tant qu’elle se contente de son statut de victime, tout va bien mais dès qu’elle prétend être traitée comme une personne à part entière la situation se corse. La bella gente est un film à voir, plein d’éléments de réflexion sur notre adéquation, souvent inconsciente, au système. Par ailleurs, les voisins de Susanna et Alfredo, un couple totalement décomplexé dans leur rapport à l’argent et au pouvoir, symbolisent parfaitement cette proximité périlleuse qui risque constamment de déteindre en nous contaminant.

Un beau film avec une excellente distribution : Monica Guerritore, Antonio Catania, Elio Germano et Victoria Larchenko, parfaite dans le rôle de Nadja. Victoria, qui vit à Rome, nous confie avoir particulièrement aimé jouer ce rôle « un personnage complexe (…) qui évolue tout le long du film ». Tous les ingrédients sont réunis pour un succès retentissant… sauf que le film, tourné en 2009, n’est pas encore sorti en Italie, faute de distributeur. Étrange mais pas étonnant car c’est un film qui dérange, on se sent mis en cause, surtout lorsqu’on prétend avoir des convictions… et dans certains milieux « les gens bien », la bella gente, sont très bien représentés.

Victoria Larchenko dans une scène du film
critique du film La bella gente