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Publié le mercredi, 1 août 2012 à 09h00

Foot, Madone et adolescence

Par Emilie Voisin

Zazà et Veleno. Deux surnoms pour deux garçons, qui deviennent amis et adultes. Annalisa est un film délicat sur ce passage si particulier qu’est l’adolescence.

Ces deux ados (joliment interprétés par deux acteurs débutants) d’une quinzaine d’années se rencontrent alors qu’ils ont deux vies aux antipodes mais la même envie de « bravades », de s’amuser, de découvrir la vie, les filles. Zazà veut s’en sortir, échapper à la mauvaise influence d’un frère délinquant, à la rue et aux yeux au beurre noir : il rêve d’être sélectionné pour jouer dans le club de foot de la célèbre Juventus ; Veleno (qui n’a pourtant rien du « poison »), fils de notables, veut sortir du cocon familial, se salir, désobéir : il se rebelle un peu mais pas trop, c’est un gentil, il a bon fond.

Le réalisateur nous plonge au cœur des Pouilles, populaires, fortement touchées par la crise, à l’accent rocailleux du sud, que certains nommeraient « terrone » (terme péjoratif pour qualifier les Italiens du Sud) mais qui résulte musical, sympathique.

Il nous raconte le quotidien de ces jeunes, entre parties et entraînements de foot à la Cosmica Football Club (l’entraîneur est sensationnel, bourru et sensible à la fois), premiers troubles sexuels et aussi premiers problèmes « existentiels » où l’on découvre la présence indéfectible des amis.

Et puis apparaît Annalisa (Aylin Prandi, vue dans des épisodes de la série Femmes de loi), au sommet d’un clocher et qui, tel un ange, saute dans le vide et bouleverse Zazà et Veleno.

L’objectif se déplace légèrement des deux protagonistes vers la figure de cette jeune fille mystérieuse, troublée et troublante, dont de vagues rumeurs disent que son futur mari serait mort et qu’elle en serait devenue folle. Le titre original, Le village des épouses malheureuses, semble d’ailleurs donner un indice…

Annalisa a le visage de la Madone, vit seule, aime provoquer, semble aller mal… C’est tout ce qu’on saura d’elle et trop de mystère règne (à mon goût) pour réussir à s’attacher au personnage : a t-elle 15 ans comme ses compagnons ou une vingtaine d’années ? Pourquoi ces gestes désespérés ? Où est sa famille ? On la perd pendant le film, on la retrouve encore plus "paumée" à la fin du film. On a dû mal à cerner son rôle, si ce n’est celui d’éveiller chez Zazà et Veleno (et tous les autres) les premiers émois sensuels et sexuels, la tendresse et l’amour même.

Le titre met l’accent sur le personnage féminin mais il n’en est que plus beau et touchant que lorsqu’il s’attarde sur les (més)aventures et les visages des deux garçons, devenus un peu plus « hommes », le temps d’un été.

Aylin Pradin, Annalisa, dans une scène du film avec Luca Schipani et Nicolas Orzella
Critique du film Annalisa